La croquignole

 

« Quand elle s'en allait à la ville,

elle avait un petit bonnet.

Les rubans étaient de pastille ; 

Le fond était de résiné.

Sa petit' cariole

Etait d'croquignole ;

Ses petits chevaux

Etaient d'pâtés chauds. »,

ainsi va la célèbre chanson Il était une Dame Tartine. La croquignole (ou croquignolle), dont il est ici question, est un petit gâteau sec, léger et croquant — ainsi qu'en fait état son nom (dérivé du verbe croquer), apparu au XVIe siècle. Il est fait de farine, de glace royale et de blanc d’œuf aromatisé.

Les croquignoles avaient nom de chiquenaudes au XVe siècle — de fait, le mot croquignole a pour sens figuré « chiquenaude » (« coup »). Elles furent aussi appelées casse-museau. Rabelais fait mention des croquignoles dans son Pantagruel (1532). Au XIXe siècle, dans son Manuel des Amphitryons (1808), Grimod de La Reynière mentionne des « croquignoles à la Chartres » et des « croquignoles à la Dauphine » parmi les éléments de repas d’apparat. Dans sa Physiologie du Goût (1826), Brillat-Savarin les intègre à l'art du petit fournier. Quant à Alexandre Dumas, il définit ce gâteau comme un petit four entrant dans la composition des croquembouches et en donne la recette à base d'amandes, parfumée à l'écorce de citron râpée.

Rose ou blanche, selon qu'elle était additionnée d'un peu de carmin ou non, la croquignole était de la taille d'une noix, soit ronde, soit allongée. Loin de ces tables d’apparat, on en faisait aussi des petites couronnes de couleurs variées pour les enfants à l’occasion de la fête des Rameaux.

Croquignoles à la Chartres

 

« Prenez une demi-livre d'amandes douces et quatre d'amères ; émondez-les, pilez-les, mouillez-les avec des blancs d'œufs ; vos amandes bien pilées, mettez-les sur le tour, avec une demi-livre de sucre en poudre; un litron de farine, un tas de sel, le zeste d'un citron rapé, un morceau de beurre gros comme un œuf ; mouillez votre pâte avec des œufs entiers, pétrissez-la afin qu'elle soit bien ferme ; coupez-la par morceaux gros comme de petites cerises;
roulez-les dans vos mains, pour les arrondir ; posez-les sur des plafonds beurrés ; appuyez dessus pour qu'elles tiennent au plafond, dorez-les à plusieurs fois ; mettez-les cuire au four un peu chaud. »

Le Cuisinier impérial et royal, de Viard, 1806.

 Ce qui donne :

Préparation : 45 min. - Cuisson : 10 à 12 min.

1 blanc d’œuf, 80 g d'amandes en poudre, éventuellement 1 goutte d'essence d'amandes amères, 80 g de sucre en poudre, 210 g de farine, 1 pincée de sel, le zeste d'un tiers de citron, 20 g de beurre, 1 œuf.

Mélangez les amandes au blanc d'œuf, ajoutez le sucre, puis la farine, le sel, le zeste, le beurre et l'œuf entier. Pétrissez pendant quelques minutes. La pâte doit être compacte, mais pas trop molle. Divisez-les en billes et déposez-les sur une plaque beurrée, en appuyant un peu sur chacune d'elles. Dorez-les avec le jaune d'œuf. Faites-les cuire dans le four préchauffé (180° /th. 6) pendant 10 à 12 minutes. Les croquignoles durcissent en refroidissant.

Croquignoles à la Chartres

 

« Vous pelez une certaine quantité (250 grammes environ) d'amandes douces, et une demi-once d'amandes amères, mouillez-les ensuite avec des blancs d'œufs et mettez-les sur un tour avec de la farine, du sucre, un peu de beurre, de sel et d'écorce de citron râpé, puis cassez des œufs et pétrissez le tout ; quand votre pâte sera bien ferme, vous la roulerez et la couperez en petits morceaux que vous poserez sur un plafond beurré, vous les dorerez et les ferez cuire dans un four bien chaud. »

 

Alexandre Dumas

Croquembouche à la Soubise

 

« Après avoir fait et cuit une livre et demie de croquignolles à la reine, vous aurez le soin de les coucher le plus également possible et d 'un pouce seulement de diamètre, puis vous en coucherez le quart plus petit de moitié. Lorsqu'elles seront cuites et refroidies, vous moulerez ce croquembouche de cette manière : après avoir fait cuire dans un petit poêlon d'office huit onces de sucre au cassé, un peu serré, vous en versez la moitié sur un couvercle de casserole à peine beurré, puis vous masquez le feu du fourneau de cendres rouges afin de maintenir le sucre du poêlon assez chaud pour vous en servir et en même temps pour l'empêcher de prendre davantage de couleur ; alors vous glacez légèrement le dessus et l'épaisseur des croquignolles que vous placez de suite dans un grand moule uni, parfaitement bien essuyé, mais pour tremper vos croquignolles dans le sucre vous devez les piquer à la pointe du petit couteau, vous les posez avec symétrie dans la forme qui vous agrée le mieux, mais toujours avec l'intention soutenue d'une forme régulière et pittoresque. Lorsque le sucre du poêlon est diminué de trois quarts vous y joignez alors la moitié du sucre au cassé conservé et quand cette partie se trouve employée vous ajoutez le reste du sucre, mais dès qu'il commence à se colorer, vous le versez sur le couvercle de la casserole où vous en avez déjà mis, ensuite vous faites cuire comme ci-dessus huit onces de sucre dans un petit poêlon d'office bien propre, puis vous l'employez de même que le précédent et après celui-là vous recommencez la même opération ; lorsque le moule se trouve garni de croquembouche, vous n'aurez pas garni le fond attendu que vous le remplacez par une abaisse de pâte d'office, du même diamètre et que vous aurez parée bien ronde, ainsi que deux plus petites dont une de six pouces de diamètre et une de quatre pouces ; alors vous les placez sur leur épaisseur, c'est-à-dire tout autour, puis avec des petites croquignolles que vous placez dans le reste du sucre, vous faites fondre dans le même poêlon comme les précédents, vous les placez en deux ronds l'un sur l'autre à l'entour et sur le bord des deux petites abaisses, vous collez la grande abaisse sur le croquembouche et sur cette abaisse vous collez le plus grand socle par-dessus le second sur lequel vous collez un rang seulement de croquignolles, vous collez par-dessus une espèce de coupe que vous formez dans un moule en dôme avec des croquignolles glacées, et à l'entour du haut vous ajoutez un double rang de croquignolles glacées, et dessus, pour servir de couronnement, vous collez des denticules formées de croquignolles que vous aurez parées carrément, puis au moment de servir vous garnissez la coupe de crème fouettée à la vanille. »

 

Recette de M. de Courchamps, donnée par Alexandre Dumas,

Grand Dictionnaire de Cuisine, 1873.

Croquignolles à la bergamotte

 

« Travailler, dans une terrine, 500 gr. de cassonade blonde avec 5 œufs entiers et 8 jaunes. Ajouter 500 gr. de farine tamisée et 3 ou 4 gouttes au plus d’essence de bergamotte. Mettre l’appareil dans une poche munie d’une petite douille et coucher les croquignolles de la grosseur d’une petite noisette, en ayant soin de les espacer assez pour qu’elles ne collent pas en s’étalant. L’appareil étant assez liquide, l’opération doit être faite vivement et les plaques mises à four moyen aussitôt garnies. »

 

Le Livre de La Pâtisserie, éditions du CEP, 1948

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